Une bénévole au service des démunis de la basse-ville de Québec

Danielle Boutet est bénévole pour le Service d’entraide Basse-Ville depuis trois ans, et ce n’est pas la COVID-19 qui va l’empêcher de livrer la popote roulante aux plus démunis du quartier Saint-Sauveur. En ces temps de crise, elle leur apporte un peu de réconfort, elle est parfois leur seul contact de la journée. En cette Semaine de l’action bénévole, portrait d’une bénévole dévouée qui se soucie du bien-être de ceux qui ont moins de chance dans la vie.

Les lundis et les jeudis ont toujours un caractère bien particulier pour Danielle Boutet. Ce sont les deux journées de la semaine où elle livre de bons petits plats cuisinés avec amour par d’autres bénévoles du Service d’entraide Basse-Ville. Son rôle à elle est de s’assurer qu’ils arrivent à bon port aux personnes âgées, aux personnes handicapées ou en perte d’autonomie. Certains sont même sous curatelle publique.

Avec l’aide d’un chauffeur bénévole, ce petit bout de femme énergique sillonne les rues du quartier Saint-Sauveur pour livrer une trentaine de repas. Elle fait bien plus que livrer de la nourriture, elle prend des nouvelles et établit un lien privilégié avec les bénéficiaires.

« Je pose beaucoup de questions, je demande si le travailleur social ou l’infirmière sont passés. On finit par se connaître. J’établis un contact et ils se révèlent petit à petit. » Elle a le sentiment de faire une différence dans leur vie. « 90% des gens que je visite sont très seuls, je suis probablement la seule personne qu’ils voient dans la journée. »

Le désir d’aider les autres 

Toute sa vie, Danielle Boutet a pris soin des autres, les jeunes comme les moins jeunes. On peut dire que ça fait partie de son ADN. Elle a œuvré en pédiatrie pendant une trentaine d’années. Cette puéricultrice a pris soin des enfants aux CHUS de Sherbrooke puis à l’hôpital l’Enfant-Jésus de Québec. Alors qu’elle était étudiante, elle a aussi travaillé auprès des aînés dans une résidence. « Je suis attirée par les personnes âgées et les enfants. C’est fou comment tout se recoupe à un moment ou un autre dans notre vie. »

À sa retraite, elle est tombée par hasard sur le site Internet du Service d’entraide Basse-Ville, un organisme soutenu par Centraide qu’elle ne connaissait pas. « C’est un beau hasard. Depuis que je fais du bénévolat, je n’ai plus le même regard sur le quartier Saint-Sauveur, alors que moi j’habite le quartier Limoilou. Les besoins sont immenses. »

En plus de la popote roulante, l’organisme communautaire fournit de l’aide alimentaire d’urgence et redistribue à faibles coûts des vêtements, des meubles et des appareils électroménagers aux démunis. Chaque année, cette ressource vient en aide à plus de mille personnes dans le besoin,

Tisser des liens grâce à la popote roulante

Au fil des ans, elle a tissé des liens avec les bénéficiaires qu’elle visite chaque semaine. Il y a cette dame octogénaire qui a de graves problèmes pulmonaires qu’elle trouve si attachante. « Elle me dit toujours qu’elle a hâte de me revoir. Je fais des petits tests avec elle. Quand je lui donne son repas, je lui demande si elle est capable de se lever pour venir le chercher. Je m’assure qu’elle est correcte. »

Elle a développé une belle complicité avec le chauffeur qui l’accompagne dans ses livraisons. Daniel, un ancien militaire qui a effectué plusieurs missions à l’étranger, porte le même nom qu’elle. Daniel et Danielle forment un merveilleux tandem. « On est un très bon team. On se parle, on échange, avec lui on rit et on a beaucoup d’humour. Je suis curieuse de découvrir chaque être humain que je rencontre sur ma route. Daniel a un immense besoin de donner aux autres. »

Une main tendue vers les autres bénévoles

Danielle Boutet prend aussi le temps d’aller faire son tour au Service d’entraide Basse-Ville pour faire connaissance avec les bénévoles aux fourneaux et ceux des autres services. L’organisme accueille parfois des gens en réinsertion sociale qui n’ont pas toujours eu la vie facile. Des échanges qui mènent parfois aux confidences.

« Il y en a un qui avait fait 25 ans de prison, je lui ai dit raconte-moi ça. Il y a aussi des jeunes de 16 ou 17 ans qui ont fait de la prison, parfois pour des histoires de drogue. Je me rends compte qu’ils ont besoin de parler. Souvent ils n’ont pas de famille, pas de bons amis et pas de soutien social. »

Aux yeux de la bénévole, le Service d’entraide est vital pour ces gens. « Certains partent de loin. L’organisme leur offre la chance de toucher à plusieurs facettes. Certains sont à la réception de la friperie et ils n’ont jamais fait ça de leur vie. Ça les aide à reconnaître qu’ils sont quelqu’un, qu’ils sont capables de se connecter socialement. On va faire des êtres humains plus heureux. »

La COVID-19 dans tout ça

Malgré le coronavirus, Danielle ne voulait pas cesser son bénévolat. Pas question de laisser tomber les gens qui comptent sur elle et sur la popote roulante. « Au début, j’étais tourmentée, je me demandais quoi faire. Mais je ne suis pas capable d’arrêter mon bénévolat, c’est un réel besoin pour moi. Je ne veux pas les abandonner, avec ce lien de confiance qui s’est créé et qui est long à construire. Quand ils me voient, ils me disent je suis donc content de te voir Danielle. La plupart des gens chez qui je livre des plats ne cuisinent pas et ne sortent pas faire l’épicerie. »

Elle prend les précautions nécessaires et respecte les règles de distanciation sociale. Elle admet tout de même que l’anxiété a monté d’un cran chez les usagers au cours des dernières semaines.

«Quand ils me voient avec des gants et qu’ils me voient reculer, alors que d’habitude j’avance vers eux, c’est sûr que ça augmente leur angoisse. Ils me disent qu’ils n’aiment pas ça et ils ont hâte que ce soit terminé. Il y a quelque chose d’irréel dans cette bibitte-là.»

Une bénévole exemplaire

La bénévole ne fait pas que le bonheur des usagers de la popote roulante, elle fait aussi la joie de la directrice générale de l’organisme, Stéphanie Tardif. À ses dires, Danielle Boutet est une bénévole exemplaire.

«C’est rassurant de savoir qu’on peut compter sur quelqu’un comme elle. Elle a un réel lien d’attachement avec les bénéficiaires. Et ce n’est pas tout le monde qui peut faire ce qu’elle fait. Il y a des situations très particulières avec des gens sous curatelle publique. Ce sont des gens extrêmement démunis.»

Celle qui chapeaute le Service d’entraide Basse-Ville a dû composer avec le départ de plusieurs bénévoles quand la crise a éclaté. Mais Danielle Boutet est demeurée fidèle au poste. « Elle est fiable, elle est proactive, elle nous avise si elle ne peut se présenter, c’est le maillon qu’on cherche. C’est une bénévole modèle. »

L’aide du Fonds d’urgence de Centraide

L’organisme communautaire a pu compter sur le Fonds d’urgence de Centraide pour répondre aux demandes d’aide alimentaire qui ne cessaient d’augmenter.

Avant la crise, une quinzaine de dépannages alimentaires d’urgence étaient orchestrés chaque semaine. Aujourd’hui, c’est une soixantaine de dépannages qui doivent être effectués de façon hebdomadaire. Le Service d’entraide Basse-Ville a bénéficié d’un soutien financier de 44 000$, une somme qui permet d’acheter les denrées nécessaires.

Danielle Boutet fait partie de celles qui voient de près les bienfaits réels de l’aide accordée sur les gens les plus vulnérables de notre communauté. « C’est une aide qui est bienvenue et qui est loin d’être dépensée pour rien. »

Bénévole pour longtemps

Elle compte rester encore longtemps au service des bénéficiaires de la popote roulante, aussi longtemps que la santé lui permettra. « Je ne lâcherai jamais le Service d’entraide, je vais rester jusqu’à ce que je sois capable. Il ne faudrait pas que je devienne une nuisance! Pour le moment, l’énergie est là. »

Quand elle parle des personnes qu’elle aide, on sent toute la bonté humaine qui l’habite. Les gens dont elle prend soin ont bien de la chance de l’avoir parmi eux, elle est un véritable joyau. « Je me sens tellement bien quand je fais mon bénévolat, je me sens une meilleure personne parce que j’ai fait plaisir. Juste le regard qu’ils me portent, ç’a n’a pas de prix. » Merci, Danielle, de faire partie de ces bénévoles qui changent des vies.