Le 10 septembre 2024, lors de la soirée de reconnaissance du Cercle des dons majeurs, Jean-Marie Lapointe, animateur, auteur et conférencier, a donné un visage à l’itinérance, révélant les histoires poignantes de ceux et celles que l’on voit sans regarder.
« Salut, mon chum, bonne journée. »
Ces mots, banals en apparence, ont changé à jamais la perception de Jean-Marie Lapointe sur les personnes en situation d’itinérance.
Jacques « Bandeau » n’avait rien fait de spectaculaire ce jour-là. « La rue, c’est ma maison. Pis t’es dans ma maison, c’est normal que je te salue. »
Cette simple phrase a ouvert la porte à une conversation qui a éveillé en Jean-Marie une profonde prise de conscience de sa chance et de ses propres privilèges.
« Jacques a été violenté, abusé, violé, à répétition, par toutes sortes de personnes dans ses familles d’accueil. Pendant ce temps, mon père, moi, me montrait à jouer du piano, avec sa patience et son amour. »
Touché par cette rencontre fortuite, Jean-Marie décide donc de faire entendre la voix de ceux et celles que l’on ignore trop souvent. En 2017, il lance la série Face à la rue, une série télévisée qui touchera des milliers de cœur pendant 2 ans.
Soutenir sans juger
Jean-Marie Lapointe a abordé un sujet souvent source d’inconfort : encourage-t-on la toxicomanie d’une personne en situation d’itinérance en lui donnant de l’argent?
Les intervenant·e·s rencontré·e·s sur le terrain sont catégoriques. « Si tu donnes un montant, que la personne suivante aussi et moi aussi, on ne cautionne pas ce que la personne fera avec l’argent, mais on contribue à la réduction des méfaits. »
Plutôt que de juger ou d’essayer de contrôler, cette approche se concentre sur la réduction des conséquences négatives liées à l’usage de substances. Pour bien comprendre, Jean-Marie Lapointe fait le parallèle avec Opération Nez rouge. Offrir le raccompagnement à des personnes en état d’ébriété n’encourage pas l’abus d’alcool, mais prévient des conséquences dramatiques.
Mais au-delà de l’argent, il a rappelé l’importance de l’interaction humaine. « Beaucoup de gens vont vous le dire, quand on prend le temps de leur parler, ils ne se sentent pas comme des sous-humains. »
Un regard sincère, une brève conversation rappelle à ces personnes qu’elles existent, qu’elles sont dignes de respect. C’est ce genre de gestes qui, bien souvent, peuvent illuminer une journée et potentiellement changer une vie.
À travers ses récits empreints d’humanité, Jean-Marie Lapointe a assurément démontré aux membres du Cercle des dons majeurs, aux créateurs et créatrices de fonds et aux directions d’organisme rassemblé·e·s au Capitole de Québec que chacun·e a un rôle à jouer.
« Chaque personne qu’on rencontre, que ce soit 30 secondes ou 30 minutes, est-ce qu’on peut faire quelque chose pour que, lorsqu’on va se quitter, elle se sente mieux? On n’est peut-être pas tous des intervenants, mais on peut tous et toutes intervenir. »
L’engagement collectif : une responsabilité partagée
Avant que Jean-Marie Lapointe plonge le public dans ses histoires bouleversantes, plusieurs autres voix ont rappelé l’importance cruciale de la solidarité et de l’engagement envers les personnes en situation d’itinérance.
Isabelle Genest, PDG de Centraide, a ouvert la soirée en soulignant la responsabilité collective qui incombe à tous et toutes. « Viktor Frankl l’a dit en plein holocauste : donner un sens à sa vie, c’est trouver son objectif avec empathie et en assumer les responsabilités non seulement pour soi, mais aussi pour l’humanité. »
Présents à l’événement, Bruno Marchand, maire de Québec, et Lionel Carmant, ministre des Services sociaux, ont eux aussi renforcé l’idée que les solutions ne peuvent être individuelles.
« Le partenariat gouvernement, municipalités et organismes, il est essentiel pour continuer à améliorer les choses », a mentionné le ministre Carmant. Selon lui, la vision des organismes se doit d’être intégrée dans tous les projets réalisés par l’État pour réussir à relever les défis complexes.
Bien qu’il soit souvent plus facile de fermer les yeux, ces phénomènes, aussi complexes et difficiles sont-ils, ne sont pas une fatalité, le maire Marchand en est convaincu.
« Cette semaine, j’ai visité des commerçants à Québec. Je n’ai jamais senti de mépris, ou d’intolérance, mais plutôt une profonde impuissance. Ce que j’ai entendu, c’est “j’ai de la misère à regarder celui qui souffre dans les yeux parce que je ne sais pas comment l’aider.” »
Dans cette optique, le maire Marchand a réitéré l’importance d’unir les forces de toute la société. « Quand les organismes travaillent avec les villes et le gouvernement, il n’y a rien qui nous est impossible. Il faut croire qu’on est encore capable de faire des miracles. »
Refuser la fatalité, soutenir l’action concertée du milieu communautaire et maintenir le filet social, c’est exactement ce que fait Centraide, jour après jour, grâce à l’appui de partenaires dévoués et d’acteur·trice·s engagé·e·s.
« Votre appui grandissant au don solidaire est un moteur de progression de la culture philanthropique dans notre région », a tenu à souligner Anne-Marie Boissonnault.
La vice-présidente au développement philanthropique a d’ailleurs profité de la soirée pour annoncer deux dons exceptionnels à quelques jours du lancement officiel de la campagne 2024 : André Couture et sa conjointe Sonia Reid se sont engagés à remettre 1 M$ à Centraide sur les 5 prochaines années tandis qu’un autre généreux couple a fait un troisième don de 1 000 actions Apple en autant d’années pour remettre pas moins de 294 000 $ à la campagne annuelle de Centraide.
Ces engagements contribuent à bâtir une société plus juste, et une communauté plus forte.
Et c’est avec des « salut, mon chum, bonne journée » que commence le vrai changement.