Se servir de son expérience pour aider les autres

À 36 ans, Sylvie Germain était loin de se douter qu’un jour elle aurait besoin de l’aide d’organismes communautaires pour nourrir sa famille. Confortablement installée à Pont-Rouge avec son conjoint, dans leur nouvelle demeure, et mère de trois enfants en santé, elle a une vie rêvée. Jusqu’au jour où le destin joue les trouble-fêtes. Alors qu’elle attend son quatrième enfant, son mari perd son emploi. Comme elle est enceinte, impossible pour elle de reprendre le travail. Comble du malheur, à sa naissance, son petit dernier est atteint d’une anomalie cardiaque. Il doit subir trois opérations, dont une à cœur ouvert. Il est hospitalisé pendant deux mois. Sans revenu familial, les factures s’empilent, le stress augmente.

Demander de l’aide

Sylvie met de côté sa gêne et son orgueil et va frapper à la porte de CERF Volant de Portneuf, un organisme communautaire soutenu par Centraide Québec et Chaudière-Appalaches. Le centre offre une multitude de services d’aide, autant pour les parents que pour les enfants. On y trouve même une cuisine collective. Malheureusement, les places pour concocter des plats à coûts réduits sont toutes comblées. On la réfère à un autre organisme soutenu par Centraide, le Carrefour FM Portneuf. La ressource lui permet de sortir la tête hors de l’eau en lui donnant accès aux cuisines créatives. Mais l’aide n’est que temporaire. Coup de chance, peu de temps après, une place se libère aux cuisines collectives du CERF Volant. Une aide précieuse qui lui redonne espoir.

L’organisme est une véritable bouée pour Sylvie. En plus de cuisiner des repas à faible coût chaque mois, elle se fait des amis. « C’est le fun de cuisiner avec des personnes qui sont dans la même situation que toi. C’est un environnement sans préjugé. Ça m’a apporté aussi un répit de stress financier. » Depuis qu’elle a mis le pied dans le monde communautaire, d’autres portes s’ouvrent à elle, comme celles de Collation-Santé-Portneuf. Le projet collectif soutenu par Centraide fournit des collations aux enfants qui fréquentent les écoles de la région de Portneuf. Chaque mois, l’organisme lui fournit les denrées nécessaires pour s’assurer que ses enfants aient une collation à apporter à l’école.

Redonner aux autres

C’est en fréquentant Collation-Santé-Portneuf que l’idée de faire du bénévolat commence à germer. L’organisme a besoin de bénévoles pour faire le tri des denrées. Elle embarque dans l’aventure avec bonheur. « J’avais l’impression de redonner à des organismes qui m’aidaient. Je faisais ma part, je contribuais à la société. Je trouvais ça moins gênant. Je n’étais pas juste quelqu’un qui recevait. » L’envie de redonner au suivant, même si elle est encore en situation de précarité, la pousse à s’impliquer aussi dans le comité de gestion de l’organisme. Ses années passées dans la fonction publique à Ottawa, à l’Office national du film du Canada et son point de vue de parent utilisateur de services font d’elle une bénévole d’expertise appréciée. En plus d’être enrichissante, l’expérience est valorisante et lui redonne confiance en elle.

Lueur d’espoir

En 2017, une annonce dans la rubrique « Emploi » du journal régional sème une petite étincelle. Il s’agit d’un poste de chargé de projet en sécurité alimentaire pour la région de Portneuf. Un emploi à temps partiel qui lui permettrait de veiller sur sa marmaille et de mettre à profit ses expériences professionnelles passées. Elle est une candidate de choix puisqu’elle est déjà bien outillée pour comprendre les enjeux de l’insécurité alimentaire, l’ayant elle-même vécue. « Je lisais l’emploi et je me disais, c’est fait pour moi. Et bien, je l’ai eu! J’étais tellement heureuse de retourner sur le marché du travail, de pouvoir contribuer à la société. Je pouvais enfin redonner ce que j’avais reçu des organismes. »

Depuis ce jour, Sylvie se sert de sa propre expérience dans son travail. Lorsqu’elle a réuni à une même table près d’une centaine d’acteurs en sécurité alimentaire, elle a pris grand soin d’impliquer des citoyens dans sa démarche pour connaître leurs besoins réels. Elle travaille aussi sur un autre projet qui lui tient à cœur. En collaboration avec Moisson Québec et d’autres organismes, le projet consiste à récupérer des denrées chez les producteurs agricoles, les supermarchés et les restaurants pour les redistribuer aux moins nantis. Il pourrait voir le jour en juillet 2019 s’il obtient le financement désiré.

Boucler la boucle avec Centraide

Sylvie Germain a une relation toute spéciale avec Centraide à chacune des étapes de sa vie. Lorsqu’elle était dans la jeune vingtaine et qu’elle travaillait dans la fonction publique fédérale, elle contribuait à la campagne Centraide avec le don à la source. « Je me disais que c’était une façon simple et efficace de contribuer. Je n’avais pas le temps de faire des recherches plus approfondies, j’avais confiance en Centraide et je me disais que c’était bien géré. » Dans la trentaine, elle est devenue utilisatrice de services, par le biais d’organismes communautaires soutenus par Centraide. Aujourd’hui âgée dans la quarantaine, elle a accès à une autre facette de l’organisme philanthropique. Elle travaille de pair avec des acteurs de Centraide à la Table de concertation en sécurité alimentaire de Portneuf. Ce sont un peu comme des collègues. Comme quoi la vie nous réserve parfois de drôles de surprises.

Des jours heureux

Après des années difficiles, à 43 ans, Sylvie vit des jours heureux. Son conjoint a un bon emploi, son petit dernier, qui souffre de malformation cardiaque, va mieux. Il joue même au hockey. Elle a un métier qu’elle aime et qui lui permet de contribuer au mieux-être de sa communauté et elle ne se demande plus chaque jour comment elle va faire pour s’en sortir et payer les factures.

Son lien avec les organismes communautaires a beaucoup changé. Elle est passée d’utilisatrice de cuisines collectives à experte en insécurité alimentaire. Comme quoi tout est possible dans la vie! Sa longue traversée du désert l’a amené dans une oasis de bonheur. Elle le savoure pleinement, entourée de ses proches. Elle en tire d’ailleurs une belle leçon de vie. « Cette période de ma vie m’a ramenée à l’essentiel, c’est à dire profiter de ma famille et mes amis, continuer à rire malgré les problèmes et être présente pour mes enfants. Pour les gens qui t’aiment vraiment, ce n’est pas important que tu aies une grosse maison, des habits à la mode ou que tu manges du filet mignon chaque semaine. Ce sont les qualités de la personne qui sont essentielles. »

À ceux qui hésitent à demander de l’aide, elle leur dit ces sages paroles: « Si tu tends la main, tu peux t’en sortir. Il y a des personnes extraordinaires qui ont le cœur sur la main et qui sont prêtes à t’aider dans les organismes communautaires. Et même si tu n’as pas beaucoup de revenus, tu peux faire une différence, tu peux contribuer. Si tu penses que tu n’as rien à offrir, ce n’est pas vrai. » Elle en est la preuve.

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